(NdlR : A sa sortie, le site Cannabis sans Frontières avait relayé cette formidable contribution au débat publié par la revue Vacarme. Un texte ramassé, précis, sérieux, documenté ; Une analyse fine et audacieuse ; Des propositions concrètes et novatrices... Mais en France on a beau se rassurer en se disant "qu’on a pas de pétrole, mais on a des idées", en matière de drogues on continue de creuser la roche à coup de pioche pour trouver de l’or noir... alors qu’il suffirait de libéraliser le marché du cannabis pour faire exploser les recettes de l’Etat avec de l’or vert. A défaut de lire ce dossier de Vacarme pour s’en inspirer, nos responsables politiques préfèrent mettre le tête dans le sable. Dommage pour la santé et la sécurité publiques !)
Troisième enjeu économique d’une légalisation des drogues : leur mode de production. Car légaliser, insistons sur ce point, ce n’est pas seulement autoriser la distribution des drogues, ni fixer leur prix, c’est aussi autoriser qu’on les produise, c’est-à-dire légitimer une industrie qui en tire profit. C’est toute l’insuffisance et la contradiction de la semi-légalisation hollandaise que d’avoir autorisé l’usage et la vente tout en ayant continué à lutter contre les réseaux d’approvisionnement par lesquels les vendeurs se fournissent auprès de producteurs. Une politique conséquente ne doit donc pas reculer devant la question suivante : qui pourrait produire légalement, et comment ?
Le cas du cannabis est sans doute particulier car il est plutôt aisé à cultiver, de sorte que l’on pourrait envisager la coexistence d’une production contrôlée administrativement et d’une autoproduction pour des quantités limitées. À l’inverse, les drogues de fabrication chimique méritent une production professionnalisée et supervisée par l’État. Ce serait sans doute un prolongement de l’actuel secteur pharmaceutique. Il n’est pas très difficile à imaginer : après tout, ce sont les laboratoires pharmaceutiques et les centres de recherche qui ont inventé la morphine, la cocaïne ou l’héroïne.
Rien à voir avec des médicaments, nous dira-t-on. Mais si les antirétroviraux de Merck aident les malades du sida à vivre au prix de chimies lourdes abîmant parfois sévèrement les corps, si les chimiothérapies dézinguent les cheveux, le foie, les reins, pour permettre à des malades d’échapper au cancer, ne peut-on accepter une industrie de pilules ou de poudres du bonheur (cocaïne, héroïne, ecstasy) qui certes présentent des risques d’effets secondaires, voire, comme tout produit chimique lourd, des risques d’accident, mais sont susceptibles de produire du plaisir et d’aider à tenir ceux qui n’y parviennent que sous adjuvant chimique ?
Voir en ligne : Vacarme