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Du "devoir de réserve" , du délit d’opinion et du fascisme rampant !

http://www.maitre-eolas.fr/post/2009/11/12/Prix-Busiris-pour-%C3%89ric-Raoult

Voilà un prix Busiris bien mérité ! Mais le devoir de réserve a quand même certaines limites reconnues par la CEDH : la Cour a rendu un avis en septembre sur les sanctions de l’officier de gendarmerie, Jean-Hugues Matelly, qui avait critiqué la politique sécuritaire d’un précédent ministre de l’intérieur. Pour la Cour, l’État a eu raison d’ “imposer des restrictions à la liberté d’expression là où existe une menace réelle pour la discipline militaire”.

Par ailleurs, la semaine dernière, le ministre de l’intérieur britannique a viré son conseiller sur les drogues, parce qu’il critiquait la position anti-scientifique du ministre (notamment sur le cannabis). J’en ai parlé sur mon blog, car ça a été un gros scandale dans la communauté scientifique.

Le devoir de réserve a encore de beaux jours devant lui avec l‘ordre juste…

http://demosocio.blogspot.com/2009/11/comment-un-ministre-peut-virer-un.html

Comment un ministre peut virer un expert scientifique

Comment se débarrasser d’un expert gênant qui contredit votre politique ? Virez-le comme un malpropre... Si vous êtes ministre de l’intérieur, vous pouvez le faire... au risque de liguer la communauté scientifique contre vous !

Cela s’est déroulé la semaine dernière en Grande-Bretagne. David Nutt présidait le Advisory Council on the Misuse of Drugs (ACMD) et Alan Johnson lui a cordialement demander de prendre la porte puisque le professeur Nutt avait publiquement dénoncé la requalification du cannabis et de l’ecstasy comme des drogues dures.

Pour Nutt, il est évident que l’alcool et le tabac sont beaucoup plus dangereux que le cannabis. C’est ce qu’il a réaffirmé cet été lors d’une conférence pour le Centre for Crime and Justice Studies (CCJS) au King’s College de Londres où il a remis en cause la distinction artificielle entre les drogues officielles et les substances comme l’alcool ou le tabac. Pour ce faire, Nutt a construit une échelle de dangerosité qui place l’alcool au cinquième rang des substances les plus dangereuses, derrière l’héroïne, la cocaïne, les barbituriques et la méthadone. Le tabac est au neuvième rang, et le cannabis, le LSD et l’ecstasy respectivement aux 11e, 14e et 18e rang.

C’est lors de la publication la semaine dernière du texte de la conférence que le ministre de l’Intérieur britannique a écrit au scientifique qu’il faisait ni plus ni moins que du "lobbying pour un changement dans la politique du gouvernement" : "il est important que les messages du gouvernement sur les drogues soient clairs et comme conseiller, vous n’avez pas à ébranler la compréhension du public."

Nutt a donc démissionné. Quelques jours plus tard, Johnson déclarait que la communauté scientifique devait comprendre "que le professeur Nutt a franchi la ligne jaune entre proposer ses conseils et puis faire campagne contre le gouvernement et ses décisions politiques". Comme Marie N’Diaye aujourd’hui, on a tenté d’objecter à David Nutt un fictif devoir de réserve. Ce devoir m’a toujours laissé sceptique par rapport à l’une de nos libertés fondamentales pour notre démocratie : la liberté d’expression.

Nutt a en plus quelques raisons d’être en délicatesse avec le gouvernement de Grande Bretagne puisqu’il est devenu critique envers Gordon Brown sur la politique sur les drogues : "c’est la première fois depuis l’avènement du Misuse of Drugs Act qu’un premier ministre va à l’encontre de l’avis du comité scientifique." C’est en 2008 que le ministre de l’époque, Jacqui Smith, décide de reclasser le cannabis en catégorie B contre l’avis de l’ACMD.

On peut trouver ici l’historique des dernières années des revirements de la Grande Bretagne dans la classification du cannabis. En Grande-Bretagne les drogues sont classées en trois catégories :

* A) les drogues dures comme la cocaïne ou l’héroïne

* B) les drogues douces comme les amphétamines ou le cannabis

* C) qui regroupe notamment les stéroïdes, les tranquillisants ou les antibiotiques

Au delà de la liberté d’expression, il y a en plus cette tension autour de l’expertise scientifique, dérivant notamment sur ce qu’on appelle en anglais l’evidence-based medecine. En effet, Nutt le confesse : "C’est un peu étrange de concevoir une politique en contradiction avec les données probantes."

D’autres universitaires sont rentrés dans l’arène, comme Colin Blakemore, professeur de neuroscience à Oxford : "Ce gouvernement manque de transparence qui préside un conseil scientifique. Dans le cas du cannabis, sa décision était prise avant même qu’il ne consulte ses experts, ce qui est très démoralisant pour les chercheurs qui font ce travail bénévolement."

Du coup, une vingtaine d’universitaires ont esquissé de nouvelles lignes directrices. Pour les universitaires, "le désaccord avec la politique gouvernementale et avec l’articulation et la discussion publiques d’éléments de preuves et les problèmes soulevés par les membres des comités consultatifs ne peuvent pas être des motifs de critique ou de limogeage."

Quand un avis scientifique n’est visiblement pas pris en compte, il est évident pour les universitaires que les raisons de son rejet doivent être explicitées publiquement. De plus, "les avis d’un comité d’experts ne cessent pas d’être valables simplement parce qu’ils ont été rejetés ou ne se reflètent pas dans la décision politique."

Ces règles sont finalement utiles quel que soit le statut du comité consultatif : elles s’appliquent très bien aux comités sans aucun membre scientifique. Elles ne font que reposer concrètement les principes de la transparence et de la liberté d’expression sur lesquelles s’est assis le gouvernement Brown la semaine dernière.

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