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L’usage de drogues doit être dépénalisé | Marianne

Selon l’aveu même de magistrats entendus par la mission d’information, ils sont incapables d’évaluer la situation sanitaire de l’usager, et donc l’adéquation de la mesure à décider. Et là, ce qui relève de cette même situation - d’une conduite à risque qui pourrait justifier d’une mesure spécifique - devra donc être évalué sur la voie publique dans le temps et le contexte de l’interpellation… par des fonctionnaires qui n’ont absolument pas la compétence pour le faire. C’est complètement irresponsable.

A l’image de cette sélection discrétionnaire confiée à la police, source potentielle d’erreurs graves ou d’abus, l’amende forfaitaire délictuelle présente bien trop d’effets pervers.

On ne peut pas tordre la procédure dans tous les sens pour tenter de faire valoir un impact illusoire de la répression sur l’usage de stupéfiants. La répression ne marche pas, elle n’a jamais marché, et raisonnablement il faudra bien que vous, législateurs, envisagiez autre chose.

Il y a quelques mois, l’ONU et l’OMS appelaient à « réviser et abroger les lois punitives qui se sont avérées avoir des incidences négatives sur la santé et qui vont à l’encontre des données probantes établies en santé publique ». La France restera-t-elle sourde à cet appel parmi tant d’autres ? Sans audace ni bon sens, et dans un immobilisme injustifiable ?

Personne ne peut plus se contenter d’une approche morale et sécuritaire après presque cinquante ans de prohibition en échec. Les seuls effets tangibles de cette prohibition sont l’insécurité et la criminalité endémique liées au trafic. Ce qui en soi est un solide argument pour une régulation contrôlée du marché.

Mais le plus urgent est de considérer l’usage de stupéfiants comme une conduite individuelle à risque, dont toutes les nuances existent entre la consommation éclairée et maîtrisée et la toxicomanie, mais qui dans tous les cas ne cause pas de tort à autrui. Et qui ne justifie pas tant d’une sanction pénale, mais plutôt, comme au Portugal, que les consommateurs soient dirigés vers une commission en charge d’évaluer leur situation sanitaire et sociale. Ainsi la police pourrait orienter son action vers d’authentiques délinquants, et s’abstraire de la politique du chiffre largement portée par le délit d’usage de stupéfiants, répression si facile, si dérisoire et inutile, et surtout tellement contreproductive. La raison et le sens des réalités voudraient donc que l’usage de toutes les drogues soit purement et simplement dépénalisé.

Mesdames et messieurs les Députés et les Sénateurs, je vous demande de ne pas approuver la modification de l’article L3421-1 du code la santé publique, et de penser, un jour, le plus vite possible, à l’abroger.

Voir en ligne : Une Tribune magistrale de Bénédicte Desforges

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